Après plus d’un mois passé en Martinique, Chintouna poursuit sa route vers le nord, direction Marie-Galante. Nous quittons le mouillage de Ste Anne le 11 février, hissons les voiles et longeons la côte sous le vent de l’île.
Martinique, nous allons te quitter. Il nous aura fallu quasiment 10 ans pour te retrouver. Mettra-t-on autant de temps pour revenir goûter la chaleur de tes plages, la beauté de ta végétation et la douceur de tes soirées ? Nul ne le sait aujourd’hui. Le 11 février, nous visons donc la ville de St Pierre, au nord de l’île, et naviguons environ 5 heures pour atteindre notre but. Nous apercevons d’abord le rocher du Diamant. Tranquillement, sous voiles, nous nous remémorons les visites terrestres en apercevant les paysages de la mer. Un autre point de vue, avec plus de recul… Les statues là-bas sur la côte, mémoires des Hommes pour ne pas oublier ceux qui sont morts dans les bateaux de la traite des Noirs ; le morne Larcher puis le rocher du Diamant que l’on laisse à bâbord. Nous longeons la côte. Ici, Petite Anse puis les Anses d’Arlet. Attention, on s’apprête maintenant à recevoir le vent de côté qui s’accélère dans la baie de Fort-de-France. Vvvvvouuuuuhhh… Le bateau gîte un peu. On sait que ça ne durera pas mais il faut bien tenir la barre. Le carnaval s’étant achevé la veille, il est l’heure pour ce vieux gréement là-bas au loin, qui vient de la capitale de l’île, de partir vers d’autres horizons… Nous croisons ce magnifique navire d’un autre temps, puis tout se calme, nous voilà à nouveau protégés des alizés par la côte. St Pierre au loin, nous nous régalons avec la vue grandiose que nous offre l’arrivée sur le mouillage, la montagne Pelée en arrière plan dominant tout. Pas si simple de jeter l’ancre ici lorsqu’il y a un peu de monde au mouillage. Le tombant arrive vite, il faut se rapprocher mais pas trop. Finalement, nous faisons notre place et dormons du sommeil du juste après une jolie journée sur l’eau.
Le lendemain, nous visons la Dominique, la grande île, située entre la Martinique et la Guadeloupe. Une navigation de 55 milles. La météo s’annonce musclée et en début de canal (zone entre deux îles où le vent a tendance à s’accélérer et où l’océan Atlantique entre dans la mer des Caraïbes), près de la montagne, le vent prend de la vitesse et la mer est très désordonnée. Nous hésitons. Attendre un alizé plus faible ou prendre la mer et serrer les dents. Des copains nous attendent à Marie-Galante, nous optons pour la deuxième solution. Nous mettons les voiles vers 8h. Sous le vent de l’île, tout va bien, c’est calme. Puis nous apercevons une barre de vent et de mer au loin… On s’approche de plus en plus et c’est parti pour le grand manège ! La mer blanchit, le vent forcit, s’accélère comme prévu. Trop de toile, nous prenons un deuxième ris. La mer est haute, désordonnée. On se fait secouer, presque à regretter d’être partis… On enlève encore de la toile et prenons un 3e ris. Maintenant, c’est mieux. Foc à l’avant et petite grand-voile. On se fait moins secouer. Mais Chintouna avance encore à 7 nœuds… Si on voit le bon côté des choses, nous arriverons plus vite en Dominique. Et effectivement, en à peine 4 heures, nous avalons le canal, heureux d’aller se protéger sous le vent de l’île. Il reste 25 milles avant le mouillage de Porthmouth au nord de l’île. Mais voilà, le vent d’Est passe dans les couloirs dessinés par le paysage et s’accélère à nouveau. Pas moyen d’être tranquilles ! Nous perdons la mer mais devons en permanence régler les voiles, jonglant entre des rafales à 30-35 nœuds et des calmes… et ce, jusqu’au bout ! Du coup, nous arrivons plus vite que prévu au mouillage et jetons l’ancre à la tombée du jour à côté de nos amis brestois des Oukiva. L’équipage est fatigué, tout salé mais content ! Demain matin, direction Marie-Galante avec Oukiva et une météo annoncée plus clémente.
Avec une petite longueur d’avance, nos amis marins nous montrent le chemin pendant toute la navigation jusqu’au mouillage de Port-Louis à Marie-Galante. 25 milles encore à parcourir. Le vent, modéré dans la matinée, décide de se calmer pour la plus grande joie de tout l’équipage. Poussés par ce petit vent qui nous permet de mettre toute notre toile, nous nous laissons bercés par le doux bruit de la mer et de l’alizé. Le jour et la nuit avec la navigation de la veille. Petit à petit nous apercevons la galette plate de Marie-Galante. Nous relâchons un barracuda pêché avec succès. Pour quelle raison ? La ciguaterra. Cette toxine est accumulée par les gros poissons en fin de chaîne alimentaire après avoir eux-même ingurgités des poissons herbivores. La toxine se situe dans les algues qui poussent sur le corail abîmé. La ciguaterra n’est pas une maladie anodine et cause de grands troubles neurologiques. Dommage, on adore le barracuda…
Assez vite, nous apercevons une ligne jaune au loin indiquant une longue plage. Nous sommes presque arrivés. En début d’après-midi, l’ancre est jetée près de nos copains du Limbao et du Oukiva. Nous sommes une nouvelle fois surpris par le nombre de voiliers mouillés ici. Il y a 9 ans, nous étions quasiment seuls… A peine arrivés, Awen et Arthur se jettent à l’eau pour retrouver les autres enfants ! Durant cette navigation, nous aurons pu admirer les vols majestueux des fous bruns, les élégants phaétons à bec rouge et une belle et grosse tortue.
Belle-île en Mer… Marie-Galante.
Envoûtante Marie-Galante… Où nous retrouvons Kara,
où nous découvrons la poterie avec Ghislaine,
à côté de la rhumerie Bielle
et où nous passerons 17 jours au rythme de cette île particulière où la rapidité de l’internet de Judith cohabite avec les vieilles coutumes locales, le rythme lent de l’île et les habitudes de toujours : le rhum à toute heure, les bœufs qui traversent les routes, etc. Cette île a quelque chose de campagnard. Elle est préservée. Tout y est calme, tranquille. Pourtant, certains habitants ne manquent pas d’idée. Les « colibris » locaux (en référence à P. Rabhi) ont créé une association pleine d’optimisme où les objets ont une deuxième vie, où l’on recycle, recrée, réinvente. Et ça crée de l’emploi !
Awen y trouve un joli T-Shirt pas cher et Arthur un DVD sur les châteaux forts ! Justement ce qu’on voit en histoire en ce moment. On retourne visiter l’habitation Murat, devenue écomusée et véritable témoignage du passé colonial lié à la traite des Noirs d’un autre temps et à la culture de la canne à sucre.
Pour résumer, Marie-Galante, on aime, on adore. La pureté de l’eau, les langoustes coquines cachées ici et là, la petitesse des lieux, la nature préservée des plages et des champs…
Quelques photos encore, de Marie Galante…
Dur, dur de quitter Marie-Galante. Ici, c’est sûr, on reviendra !
On vous souhaite un joli printemps.
A bientôt avec vos commentaires.
Sonia